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On dit LA Covid-19

COVID-19, c’est le joli nom de code de la maladie qui aura marqué l’année 2020.

Et on évoque « la » maladie à coronavirus (plus exactement COronaVIrus Disease en anglais). C’est pour cela que l’on doit dire « la Covid-19 ». L’office québécois de la langue confirme l’usage du féminin, l’Académie française aussi.

Alors, on connait déjà l’objection habituelle : « Ah ouais, mais à cause que l’Académie française ce sont des vieux qui n’y connaissent rien et qui croivent qu’ils savent tout mieux que nous les gens, alors je fais le contraire. Car sa va à la fin, hein ! Ah que c’est nous les gens qui faisons évoluer la langue par l’usage, wesh ! »

Pour le sida, vous dites quoi ? Il finit par -a, donc il faudrait dire « la sida » ? Ben, non.

Pour le rhume, vous dites quoi ? Il finit par -e, donc il faudrait dire « la rhume » ? Ben, non.

Sinon, il nous reste un ultime espoir. Faire de cet emploi correct du féminin pour la Covid un marqueur social, une sorte de moyen subtil de distinguer les gens cultivés de la plèbe. Allez, on parie ?

Bien ou pas bien ?

Certaines phrases que l’on nous dit sont-elles bien ou pas bien ? En fait, ça dépend souvent du contexte.

« Je suis touché »

  • (bien) J’ai reçu un compliment
  • (pas bien) Je suis militaire pendant un combat

« Ce n’est pas grave »

  • (bien) J’ai fait une gaffe
  • (pas bien) Je chante en basse dans une chorale

« Ne dis surtout rien à tes parents »

  • (bien) On prépare un cadeau ou une fête surprise
  • (pas bien) Le curé se rhabille

« Au suivant ! »

  • (bien) Je suis dans la salle d’attente chez le médecin ou à la poste
  • (pas bien) Je suis au bordel

« Finalement, je pense que je ne vais pas le garder »

  • (bien) Elle est baby-sitter et a un contretemps
  • (pas bien) Elle est enceinte

« Je passerai vous prendre demain entre 15h00 et 15h10 »

  • (bien) Mon chauffeur
  • (pas bien) Mon amant

« Tu manges ta moitié et moi ma moitié »

  • (bien) On partage un carré de chocolat
  • (pas bien) Nous sommes des mantes religieuses

« Je suis sur une pente descendante »

  • (bien) Ski alpin
  • (pas bien) Chez le psy

« Un type m’est rentré dedans »

  • (bien) Accident de voiture (léger)
  • (pas bien) Dans une partouze

« Est-ce qu’il y a un véto ? »

  • (bien) On s’apprête à voter dans le groupe
  • (pas bien) Mon chien gît au sol

« Le passage à l’acte est imminent »

  • (bien) Le notaire annonçant que tout est en ordre
  • (pas bien) Briefing du service de renseignement anti-terroriste

Pour en finir avec les « à noter que »

Imaginez que votre livre de géographie ressemble à ceci.

La France.
À noter que la France est un pays d’Europe. Il est à noter que Paris en est la capitale. Notons que Lyon, Marseille et Lille sont les autres villes importantes. Il est à noter aussi que la France comporte des départements et pays d’Outre-Mer. Notons enfin que la population française s’élève à plus de 67 millions d’habitants. À noter que le Président est Emmanuel Macron. Il est à noter que la fête nationale est le 14 juillet.

Insupportable !

Et pourtant, tous les jours on lit des textes où des gens écrivent comme ça. Franchement, ça fait mal aux yeux. Pourquoi cette injonction à insister sur ce qui vient, alors que justement on est en train de lire le texte, donc précisément d’assimiler ce qui y est écrit ? Pareil avec « ajoutons que », « il faut préciser que » et consorts.

Heureusement, il y a une parade simple. Ces expressions ne servent absolument à rien. Gommez-les directement du texte, il ne faut même rien changer d’autre à la phrase (à part la majuscule en début de phrase, bien sûr) et le texte sera tout aussi intelligible et surtout beaucoup plus digeste.

L’écriture inclusive au pluriel

L’écriture inclusive, c’est sympa !

… Bon, là, on a déjà bien divisé nos lecteurs. Pardon, nos lecteur•rice•s. Bref, celleux qui nous lisent, quoi !

Mais il faudrait aller encore plus loin.
Pourquoi vouloir seulement être inclusif entre les genres féminin et masculin de notre langue ? Alors que le français permet aussi d’écrire un mot tant au singulier qu’au pluriel.

Ça pourrait donner ceci :

Un•D•e•s animateur•s e•s•on•t présent•s.

Plus fort encore, combiner le masculin/féminil avec le singulier/pluriel :

Un•D•e•s animateur•rice•s e•s•on•t présent•e•s.

Chiche, on essaye de populariser l’usage…

Cessez d’invoquer les « problèmes techniques »

« En raison d’un problème technique… » Cette expression peut servir à masquer tous les dysfonctionnements, mais elle a un incroyable côté pervers.

Elle sert le plus souvent à cacher la complexité des technologies utilisées pour la vie de tous les jours. Elle renforce l’idée que la technique est une forme de magie ou que les machines sont de grosses boîtes noires dont il serait vain de chercher à comprendre comment elles fonctionnent.

Ça a pour effet pervers de légitimer le point de vue de ceux qui vous sortent des « oh, moi je n’y comprends rien à tous ces trucs d’ordinateur », et ça encourage les gens à considérer normal d’être ignorant et d’être prêts à subir toutes les dominations et toutes les manipulations.

Et si on commençait déjà par nommer les problèmes correctement ?

« En raison d’un problème technique, votre réservation n’a pas pu être effectuée. » Magie ? Ou alors qu’on explique ce qui se passe : s’agit-il de règles (nombre de jours, nombre de personnes) qui n’ont pas été respectées, ou alors un problème d’ordinateur : le serveur de réservation est hors service, la connexion a été interrompue en raison d’un problème de réseau…

« En raison d’un problème technique, notre train partira avec 15 minutes de retard. » Magie ? Signalisation défaillante, surchauffe du moteur de la loco… Et si ça se trouve, c’est peut-être un problème humain qui n’a rien à voir avec la technique (par exemple le conducteur précédent a terminé son service et son remplaçant n’est pas encore là), mais qu’on masque habilement dans le fourre-tout des problèmes techniques pour que les gens ne commencent pas à questionner notre organisation…

En raison d’un problème technique, la suite de ce billet ne peut pas être affichée.

Arrêtez de vous déclarer « choqué•e•s » pour tout et n’importe quoi !

J’ai préparé mon petit-déjeuner. J’ai mis un peu trop de lait dans mes céréales, j’étais choquée.
Je sors de chez moi. Il fait un peu plus froid que d’habitude. J’étais choquée.
Je traverse la rue. Les automobilistes ne s’arrêtent pas toujours. J’étais choquée.
J’arrive au travail. Je croise ma collègue avec un document dans les mains. J’étais choquée.
Le téléphone sonne. Je suis choquée. C’est mon patron qui me demande si je peux aller à une réunion. Je suis choquée.

… et ainsi de suite.

Franchement, c’est saoûlant. Il y a vraiment des choses dans le monde qui peuvent nous choquer, mais vraiment, à savoir nous soulever le cœur ou nous brutaliser : de la violence extrême, les situations humanitaires, etc.

Mais utiliser ce mot pour des situations de la vie de tous les jours, ou par rapport à de simples paroles qu’une personne vous aura dites, c’est complètement disproportionné. Et ça vous fait surtout passer pour une personne incapable de gérer clairement ses émotions. C’est un peu comme le petit con qui vole au magasin du coin et se prend pour un résistant en qualifiant son geste de « désobéissance civile » (ouais, et les gens qui vivent en dictature, ils peuvent se rhabiller, hein).

Le prochain ou la prochaine qui prétend être « choqué•e » pour des futitilés, qu’elle ou il sache qu’on lui aura mis le nez dedans !

Arrêtez avec le mot « souci » !

« Pas de soucis », « On a un souci ici », etc.  Non, trois fois non !

S’il y a un problème, dites-le franchement.  « Souci » n’est ni un substitut pour le mot « problème », ni un mot pour désigner un « petit problème ».

En français correct, on peut « avoir le souci » du détail, ce qui veut dire qu’on met cet aspect au centre de notre attention, ou « se faire du souci » pour quelqu’un ou quelque chose, ce qui veut dire qu’on s’inquiète.

Par pitié, que l’on arrête de massacrer notre belle langue en détournant des mots de leur usage premier.  Une évolution de la langue qui fait qu’on se comprend moins bien qu’avant et qui appauvrit la langue, c’est vraiment nul.

Un peu de grammaire

Quelques constructions de phrases me laissent songeur

  • Le feu était éteint. Par définition, un feu brûle. Éteint, ce n’est plus un feu. Dans le même ordre d’idées, où est passé ton poing lorsque tu ouvres la main ?
  • Je connais une personne machiste, elle bat sa femme. Le mot « personne » est du genre féminin, même pour un homme… et même pour un macho. Bon, cette figure de stye s’appelle une sylepse.
  • La télévision marche. Pourtant, elle n’a pas de pieds, même si elle casse souvent les notres.
  • Notre bébé marche depuis 6 mois. Fichtre ! À l’heure qu’il est, il doit se trouver à au moins 500 km de la maison, à force de marcher.
  • Pour se défendre, les forces militaires ont utilisé des missiles antiaériens. Bonne idée pour se défendre contre l’air, mais des missiles anti-avions ou anti-missiles n’auraient-ils pas été plus indiqués ?

Finis ma phrase !

OK, le jeu continue ici, et on ajoutera au fur et à mesure.

  • Le gangster a descendu … les poubelles
  • Le général a commandé … une choucroute
  • Le commissaire a arrêté … de boire du whisky
  • Le top-model a posé … son livre sur la table
  • L’avocat a défendu … à son fils de sortir le soir
  • Le chirurgien a opéré … une fameuse reconversion dans l’immobilier Continue reading