L’inventage de mots

Ce n’est pas nous qui avons commencé.

Décrédibiliser n’existe pas, on dit discréditer.

Dans les entreprises, les gens hésitent parfois s’il faut dire prioritiser ou prioriser. La réponse est simple : aucun des deux n’existe. Dommage, ce serait plus court que de dire qu’on veut octroyer la priorité à tel projet. Ceci étant, les entreprises sont souvent le royaume du franglais (on se fait un conf-call avant le board, okay ?) ; notre automate (*) se charge de les dénicher.

S’autocensurer, c’est prudent mais c’est quand même un sacré pléonasme, c’est l’équivalent de la ceinture et des bretelles, et ceux qui parlent de s’autocensurer soi-même sont probablement ceux qui y rajoutent un parachute. On pratique l’autocensure, inutile d’en rajouter.

Un piétonnier ça n’existe pas (en plus c’est super moche à dire), le mot correct est une zone piétonne.

L’année 2020 a entraîné son lot de mots utilisés n’importe comment : pourquoi parler d’enseignement en distanciel alors qu’existe le concept d’enseignement à distance ? Et se retrouver en présence d’autres personnes, c’est quand même plus joli à dire que cet horrible « en présentiel ». Si vous êtes assis dans votre fauteuil, vous n’allez pas commencer à raconter que vous êtes « en fauteuilanciel », que diable !

Exit (**) aussi les anglicismes : on trace vos contacts covid (inutile de parler de tracing), on pratique un test de dépistage (parler de testing, c’est grotesque et ça rallonge même la phrase pour rien). Et tant qu’à faire, le running, très en vogue comme activité solitaire en 2020, avait déjà un nom, c’est la course à pied.

(*) On peut dire qu’il envoie la sauce.
(**) Oui, c’est fait exprès. C’est pour faire cool.

On dit LA Covid-19

COVID-19, c’est le joli nom de code de la maladie qui aura marqué l’année 2020.

Et on évoque « la » maladie à coronavirus (plus exactement COronaVIrus Disease en anglais). C’est pour cela que l’on doit dire « la Covid-19 ». L’office québécois de la langue confirme l’usage du féminin, l’Académie française aussi.

Alors, on connait déjà l’objection habituelle : « Ah ouais, mais à cause que l’Académie française ce sont des vieux qui n’y connaissent rien et qui croivent qu’ils savent tout mieux que nous les gens, alors je fais le contraire. Car sa va à la fin, hein ! Ah que c’est nous les gens qui faisons évoluer la langue par l’usage, wesh ! »

Pour le sida, vous dites quoi ? Il finit par -a, donc il faudrait dire « la sida » ? Ben, non.

Pour le rhume, vous dites quoi ? Il finit par -e, donc il faudrait dire « la rhume » ? Ben, non.

Sinon, il nous reste un ultime espoir. Faire de cet emploi correct du féminin pour la Covid un marqueur social, une sorte de moyen subtil de distinguer les gens cultivés de la plèbe. Allez, on parie ?

Bien ou pas bien ?

Certaines phrases que l’on nous dit sont-elles bien ou pas bien ? En fait, ça dépend souvent du contexte.

« Je suis touché »

  • (bien) J’ai reçu un compliment
  • (pas bien) Je suis militaire pendant un combat

« Ce n’est pas grave »

  • (bien) J’ai fait une gaffe
  • (pas bien) Je chante en basse dans une chorale

« Ne dis surtout rien à tes parents »

  • (bien) On prépare un cadeau ou une fête surprise
  • (pas bien) Le curé se rhabille

« Au suivant ! »

  • (bien) Je suis dans la salle d’attente chez le médecin ou à la poste
  • (pas bien) Je suis au bordel

« Finalement, je pense que je ne vais pas le garder »

  • (bien) Elle est baby-sitter et a un contretemps
  • (pas bien) Elle est enceinte

« Je passerai vous prendre demain entre 15h00 et 15h10 »

  • (bien) Mon chauffeur
  • (pas bien) Mon amant

« Tu manges ta moitié et moi ma moitié »

  • (bien) On partage un carré de chocolat
  • (pas bien) Nous sommes des mantes religieuses

« Je suis sur une pente descendante »

  • (bien) Ski alpin
  • (pas bien) Chez le psy

« Un type m’est rentré dedans »

  • (bien) Accident de voiture (léger)
  • (pas bien) Dans une partouze

« Est-ce qu’il y a un véto ? »

  • (bien) On s’apprête à voter dans le groupe
  • (pas bien) Mon chien gît au sol

« Le passage à l’acte est imminent »

  • (bien) Le notaire annonçant que tout est en ordre
  • (pas bien) Briefing du service de renseignement anti-terroriste

Carnets du confinement – avril 2020

Nous avons recueilli le témoignage de quelques citoyens. En mode tranche de vie. Retranscription d’interviews menées par vidéoconférence. (NDLR : le texte est une retranscription aussi fidèle que possible, mais en nettoyant certaines redites ou lorsque la personne a demandé de présenter autrement sa pensée. Ah oui, en nettoyant les mains aussi, ha ha.)

Magda et ses voisins enragés

Tout d’abord, où vis-tu ?

Je suis à Schaerbeek, c’est une des communes de Bruxelles. Un joli appartement dans un grand bloc.
Il y a 60 appartements chez nous, ça a l’air beaucoup comme ça, mais on a vraiment de l’espace.
Mais forcément, sur 60 entités, il y aura toujours au moins 4 ou 5 connards. On n’y peut rien, c’est statistique. Continue reading

Pour en finir avec les « à noter que »

Imaginez que votre livre de géographie ressemble à ceci.

La France.
À noter que la France est un pays d’Europe. Il est à noter que Paris en est la capitale. Notons que Lyon, Marseille et Lille sont les autres villes importantes. Il est à noter aussi que la France comporte des départements et pays d’Outre-Mer. Notons enfin que la population française s’élève à plus de 67 millions d’habitants. À noter que le Président est Emmanuel Macron. Il est à noter que la fête nationale est le 14 juillet.

Insupportable !

Et pourtant, tous les jours on lit des textes où des gens écrivent comme ça. Franchement, ça fait mal aux yeux. Pourquoi cette injonction à insister sur ce qui vient, alors que justement on est en train de lire le texte, donc précisément d’assimiler ce qui y est écrit ? Pareil avec « ajoutons que », « il faut préciser que » et consorts.

Heureusement, il y a une parade simple. Ces expressions ne servent absolument à rien. Gommez-les directement du texte, il ne faut même rien changer d’autre à la phrase (à part la majuscule en début de phrase, bien sûr) et le texte sera tout aussi intelligible et surtout beaucoup plus digeste.

Heure d’été, problème divers

Avant, le marronnier de la presse, deux fois par an, était de refaire le débat pour ou contre l’heure d’été. On interviewe ceux qui sont pour, et ceux qui sont contre, on parle uniquement des aspects ou des tracas de la vie quotidienne, on enrobe le tout dans un beau vernis de « méchants technocrates qui ont décidé ça en haut lieu contre l’avis du peuple » et ça fait un beau petit article. Qui est déjà écrit puisqu’il suffit de reprendre celui de l’année passée.

Mais désormais, les règles dans les pays de l’Union européenne changent. Non seulement on pourra disserter à nouveau du bien-fondé ou pas de supprimer le système, mais on se demandera s’il est bien normal que chaque pays peut décider d’avoir ou non un changement d’heure, et si le choix de tel pays d’opter pour tel fuseau est bien cohérent avec son voisin qui a quant à lui opté pour le fuseau Y, quand bien même ils sont à la même longitude.

Voici quelques propositions pour remettre encore une couche de désordre par dessus ce chaos. Continue reading

Une bonne année… a posteriori ?

Chaque année on se fait avoir. Tout le monde se souhaite des bons vœux pour les 12 mois à venir. C’est un peu une incantation : « Allez, on croise les doigts pour que tout aille bien, réussite, santé, argent et bonheur. »

Alors que quand on y réfléchit, en 2020 :

  • Peut-être qu’un de vos proches, ou votre animal de compagnie, va mourir et que vous sombrerez dans une grosse déprime
  • Peut-être que vous aurez un accident de la route et que vous ferez un long séjour en hôpital assorti d’une longue et pénible rééducation et d’un handicap permanent
  • Peut-être qu’il va y avoir une crise financière dix fois plus forte qu’en 2008 et qu’on va sérieusement être dans la dèche
  • Peut-être qu’on va avoir une météo pourrie, qu’il va pleuvoir tout l’été ou, à l’inverse, que ce sera une canicule insupportable et meurtrière
  • Peut-être qu’on aura une épidémie d’une sale maladie, que ce sera la psychose et la suspicion généralisée envers toute personne vaguement suspecte de vous refiler cette crasse, et que ça va pourrir les relations entre les gens.
  • Peut-être que vous allez apprendre que vous êtes atteints d’une maladie grave
  • Peut-être que Donald Trump sera réélu (et c’est même assez plausible, en fait)
  • Peut-être que vous serez cambriolés
  • Peut-être qu’on va apprendre tel ou tel scandale qui va nous plomber davantage le moral sur la condition humaine
  • Peut-être que la plupart des gouvernements vont prendre des mesures scandaleuses qui vont créer davantage d’inégalités et d’injustice
  • Les guerres ne vont pas s’arrêter, le terrorisme ne va pas cesser et au contraire il sera toujours de plus en plus sournois (tiens, j’ai arrêté de dire « peut-être »)
  • Etc.

Alors, cessez de souhaiter une BONNE ANNÉE à tour de bras avec cet air guilleret !

On devrait décerner la bonne année a posteriori, pour juger si elle a été bonne, sans jamais faire de pronostic sur celle qui commence. Car on ne sait jamais de quoi l’avenir sera fait, et il n’est souvent pas rose…

Que de questions sans réponse – Ça ne finit jamais…

C’est à se demander pourquoi…

  • Pourquoi les vieux répètent-ils sans cesse qu’ils vont bientôt mourir, que c’est peut-être leur dernier été… alors qu’en réalité ils tiennent encore presque tous jusqu’à 90 ans ?
  • Pourquoi parle-t-on de guitare sèche et jamais de guitare humide ?
  • Pourquoi les gens qui déclarent avoir arrêté de boire continuent à boire, fût-ce de l’eau ?
  • Pourquoi le mot « oxymore » qui désigne des mots qui s’opposent, est quant à lui un pléonasme (occis mort) ?
  • Pourquoi existe-t-il de la bière sans alcool mais pas de whisky ou de gin sans alcool ?
  • Pourquoi parle-t-on d’enfant-roi alors que normalement un enfant ne peut être que prince ?
  • Pourquoi être dans une merde noire est pire que simplement être dans la merde ?
  • Pourquoi pour ne pas faire de bruit (par exemple au théâtre) on met le téléphone « en mode avion » alors qu’un avion est un des objets les plus bruyants au monde ?
  • Pourquoi fait-on des fiançailles alors qu’ensuite on ne fait qu’un mariage ?
  • Pourquoi une femme enceinte, quand on lui demande « De qui ? » répond du nom de son mari, alors que des années plus tard, évoquera cette période comme étant enceinte de, et ajoutera le nom de son enfant ?
  • Pourquoi parle-t-on de papa poule et jamais de maman coq ?
  • Pourquoi pour avoir de l’argent devant soi doit-on d’abord le mettre de côté ?
  • Pourquoi dit-on que manger du poisson est bon pour la mémoire alors qu’en même temps on affirme que la mémoire des poissons n’est vraiment pas terrible ?

L’écriture inclusive au pluriel

L’écriture inclusive, c’est sympa !

… Bon, là, on a déjà bien divisé nos lecteurs. Pardon, nos lecteur•rice•s. Bref, celleux qui nous lisent, quoi !

Mais il faudrait aller encore plus loin.
Pourquoi vouloir seulement être inclusif entre les genres féminin et masculin de notre langue ? Alors que le français permet aussi d’écrire un mot tant au singulier qu’au pluriel.

Ça pourrait donner ceci :

Un•D•e•s animateur•s e•s•on•t présent•s.

Plus fort encore, combiner le masculin/féminil avec le singulier/pluriel :

Un•D•e•s animateur•rice•s e•s•on•t présent•e•s.

Chiche, on essaye de populariser l’usage…

Notre réunion d’octobre 2019

** MEMBERS ONLY **

Le PV de notre réunion a été mis à disposition sur la plateforme. Merci à Willem et ses amis qui nous ont mis à disposition leur espace, et pour leur petite « surprise » (trop gentil, vraiment).

L’auto-gestion fonctionne désormais parfaitement, on a des comptes nickel et les campagnes recrutement et presse se déroulent comme convenu. On a également une nouvelle série en préparation dans la catégorie humour noir : on laisse bosser l’équipe à son rythme maintenant.

Notez bien les instructions pour la prochaine réunion. Le code de départ est 724 et vous devrez soustraire le nombre qui vous a été donné durant la réunion. Pour celles ou ceux qui n’ont pu être avec nous, c’est la procédure habituelle pour se mettre à jour.